Un peu plus de design agricole: la grange solaire version “débrouille”
A quoi rêve une vache…
A cela
encore cela
et encore cela
de l’herbe quoi …
Mais ici au Nord Ouest Argentin, l’herbe l’été, ne peut pas sécher, il pleut trop, elle pourrit. Nous avions fait le design d’une grange solaire pour sécher le foin. Mais qui voudrait dépenser de l’argent pour de l’herbe. Quelle idée? C’est pas sérieux l’herbe.
Alors nous avons revu notre copie… la grange est moins glamour, moins techno, mais grace à cette remise en question nous avons abouti à un consept complètement solaire qui fonctionne absolument sans machine :
Le foin est déposé sur un tapis roulant en filets agricoles de récupération, actionné par une pédale actionnant un système de rouages qui le fait avancer de 2m en 2m; juste de quoi laisser quelqu’un épandre le foin bien régulièrement.
La grange fait une trentaine de mètres de long et une dizaine de large. Une fois le foin bien réparti, la grange est fermée hermétiquement, le plus possible. Le soleil chauffe le toit. L’air s’en va par les cheminées du toit en créant une dépression, l’air à la température extérieure rentre par le bas et traverse le foin. Le foin est relativement près du toit comme cela il bénéficie du chaud du toit, mais sans cuire. C’est le système du push&pull, de vases communiquants boostés par la thermodynamique et la viscosité de l’air humide avec une petite aide du maelstrom. Merci maestro.
Le truc? L’air en arrivant et en partant est accéléré par un système de vortex qui booste la circulation d’air et le renouvelle à toute allure de manière à sécher au plus vite. L’intérieur est astucieusement mis en place pour renforcer ces volutes invisibles et des systèmes de récupération de condensation sont placés là où il faut. Le tour est joué. La grange est désormais entièrement solaire.
Il fallait insister et ne pas abandonner le projet sur l’autel du progrés OGM, car voila ce qui attend les vaches en hivers si rien n’est fait pour elles… Ces petits veaux tout juste nés et ces vaches pleines n’ont plus qu’à manger de la terre; comme les hommes à Haïti vous me direz…
Non, ici les vaches ont plus de chance que les hommes… les ingénieurs s’occupent d’elles. Un peu partout dans le monde on apprend aux jeunes étudiants en agronomie qu’il faut donner du maïs aux vaches. Vous pensez on ne va pas leur donner de l’herbe quand même, cela ne nourrit pas comme le maïs; OGM, c’est tellement plus simple à faire pousser. Il suffit d’acheter les graines chaque année, les herbicides, les engrais, les pesticides qui vont avec et les machines pour tout épandre et bien compacter la terre. Tout le kit; on vous fera facilement un emprunt pour cela, il faut soutenir l’économie, ça marche bien.
Il faut rappeler que le maïs seul, ne fabrique pas de viande, mais de la graisse. C’est bien, mais il ne faut pas que l’animal bouge, sinon il la perd… c’est peut être pour cela que l’on a créé les feed lot, sorte de camps de concentration où l’animal est gavé sans pouvoir bouger… 80% de la viande argentine provient de cela… la viande brésilienne, la viande française…
La combinaison gagnante c’est le tourteau de soja OGM. On récupère l’huile pour les voitures et on donne le résidu, le tourteau au bétail… C’est ce que mange 70% des vaches en France. La France est le meilleur client de tourteau de soja OGM du Brésil; plus d’un quart des exportations brésiliennes. Les cultures OGM sont interdites en France, mais les vaches nourries au soja OGM, dans leur étables, sans pouvoir bouger, sont-elles OGM? Eh bien non, logique…
“Colonizar a Amazonia pela pata do boi” “l’Amazonie par la pate du boeuf” … le grand slogan des politiciens brésiliens des années 70 s’applique enfin à fond… pour nourrir chaque français il faut 458 m2 de forêt amazonienne plantée de soja OGM, selon Greenpeace. Ce n’est pas finit, la consommation de viande augmente chaque année : cette année de crise, elle a fait environ 28%. Depuis les années 70 la production de soja est passée de 0 à 21 millions d’hectares au Brésil. On n’arrête pas le progrès.
Revenons à nos vaches; ici, dans le nord argentins, le maïs une fois poussé, est laissé sur pied pour être consommé en hivers ou bien transformé en silos… Les silos ce sont ces gros tas noirs dans les champs, couverts d’une bache noire et de pneus, un joli paysage bucolique. Le maïs est broyé et laissé fermenté jusqu’à l’hivers. Ce principe marche parfaitement bien en laboratoire, mais dans la nature ce n’est pas toujours évident à gérer, car il est assez difficile de faire le tri entre les bactéries qui vont fournir des acides lactiques et les levures qui vont en faire de l’alcool…, c’est petit ces bestioles là, vous savez.
Bref les petits veaux que vous voyez devant vous sont complètement bourrés… pafs… pas un seul ne marche droit, vous me direz “ils ne conduisent pas, ce n’est pas grave…” en fait l’alcool s’attaque directement à leur foie; et le foie c’est lui qui gère et construit les défenses immunitaires. Ces veaux sont mal partis dans la vie. Ils vont passer leur temps chez le vétérinaire. Pour éviter de dépenser de l’argent tout de suite, ils vont en coûter beaucoup plus plus tard. C’est sans compter avec les fermentations butyriques qui sont causées par la terre et les bactéries qui s’y mêlent… un petit veau n’y résistera pas 3 mois.
En Argentine le problème est là : le prix de la viande est bloqué par l’état… 20cent d’euro le kilo. Cela ne rapporte plus de faire de la viande, tout le monde abandonne… Les seuls qui s’en sortent, ce sont ceux qui les nourrissent à l’herbe, m’avoue un ingénieur agronome… pourtant tout le monde pousse encore à planter du mais et du soja… Les Argentins viennent d’annoncer qu’ils ont un déficit cette année 2009 de 3millions de veaux… Non, vous ne rêvez pas, nous parlons bien de l’Argentine d’aujourd’hui, l’Argentine qui produisait les records de viande du monde est aujourd’hui celle des ingénieurs agronomes. Comme disait Coluche, “vous les laissez dans le désert : au bout de 3 semaines ils vous réclament du sable”.
Ici, d’aprés les calculs que nous avons faits sur le terrain, le maïs transgénique a donné cette année 12t/ha en mouillé et 8t/ha en sec… peut être ce sont les graines, le terrain… je ne sais pas pourquoi le rendement est si faible… cependant avec le pâturage on est entre 20 et 60 t/ha… et en plus, une fois que c’est planté cela repousse chaque année… plus besoin de racheter des graines, il n’y a plus qu’à récolter… Vous choisissez quoi vous? Et bien ici on reste au au maïs.